Les experts à Montchanin – « Vous avez un peu d’argent mais pas de fortune »

Ils sont venus à l’heure au rendez-vous ou pas à l’hôtel Kyriad de Montchanin. Ils sont venus aussi sans rendez-vous, toujours aimables _ la très grande majorité _ ou pas. Comme ce bougre qui n’avait qu’une idée en tête, faire honte au commissaire-priseur après lui avoir présenté deux potiches.

« Vous n’y connaissez rien, vous ne savez pas ce que c’est! » s’emporte l’individu. « J’ai pourtant de belles choses à vous montrer » ajoute-t-il sur un ton moins agressif. Eh oui, l’argent, du moins ce qu’il représente aux yeux de ces anonymes, peut faire tourner les têtes, même vriller l’esprit.

Le premier à se présenter dans un salon de l’hôtel où ont pris place Quentin Breda et François-Xavier Poncet, deux commissaires-priseurs, arrive du Creusot. Il profite de l’estimation gratuite pour connaître la valeur d’un saxophone _  avant de se rendre, espère-t-il, à l’émission Affaire conclue _ ayant appartenu à son père qui en jouait notamment quand les cirques plantaient leur chapiteau à Charolles. ‘ »A cette époque, ils n’avaient pas d’orchestre », dit-il. L’estimation est de 300 à 400 €. « Un même modèle avec l’étui en meilleur état a été vendu aux enchères 650 € » lui indique Quentin Breda.

A la table à côté, un Blanzynois fait expertiser une statue en bronze de Jeanne d’Arc signée Eugène Marioton. Là encore, ce n’est pas je jackpot. Elle vaut entre 300 et 500 € quant aux trois tableaux présentés, ils varient dans une fourchette de 40 à 100 €.

Nos commissaires-priseurs de la maison de vente Rossini, tournent le dos à Paris plusieurs fois dans l’année pour être au plus proche des gens. « A Paris, nous sommes installés juste devant la maison Drouot. Ce matin, nous étions à Chalon, à Montchanin cet après-midi et demain, mercredi, à l’Ibis à Autun », raconte Quentin Breda. « Nous n’achetons pas, nous vendons lors des enchères pour les gens ». Ils partent à la découverte d’un objet rare dont le propriétaire ne soupçonne pas le prix. Comme ces pièces de la ruée vers l’or de 1851 qui ont fini dans un tiroir à Lille et ont été vendues 130 000 € avant de repartir aux Etats-Unis.

 

 

Les prix sur des sites de vente

donnent de faux espoirs

 

 

« Souvent, on se rend compte que la valeur sentimentale prend le dessus sur la valeur financière » relève Quentin Breda.

Sous ses yeux, un homme accompagné de son épouse, déballe une montre gousset tout en or. Le couple repart déçu à l’évocation du prix, entre 2 et 3000 €. « Nous avons de vieilles breloques à la maison, alors on se renseigne sur le prix. Ici, l’estimation est très basse, j’ai eu jusqu’à dix fois plus. On ne va pas les brader ».

Au cours de cet après-midi, des dizaines d’objets ont défilé entre les mains des deux commissaires-priseurs. « On voit un peu tout et n’importe quoi, un peu plus qu’il ne fut un temps » note encore Quentin Breda. Quand l’estimation résonne aux oreilles du propriétaire, le vent de la fortune tombe rapidement. Beaucoup pensent avoir en main un trésor, « alors c’est dur de déconstruire le rêve » laisse-t-il échapper.

Quand il présente son tableau signé Tony Binder, il est sûr d’en tirer un très bon prix. « Il vaut 16 000 € » assure-t-il. Sur eBay, effectivement mais pour l’expert devant lui, c’est dans les 3000 €. C’est dur à admettre.

Pour la mamie, c’est beaucoup plus simple. Elle tient sur ses genoux des enveloppes dans lesquelles sont rangées une voire trois pièces d’or. Valeur d’une pièce, entre 250 et 300 € dont une quand même grimpe entre 500 et 700 €. « Je croyais être plus riche que ça ». Un bas de laine estimé à 6000 €.

Bijoux, vases, une collection de timbres qui a appartenu à « mon grand-père, c’était un poilu », des affiches, des chaussures cloutées de paysan, la breloque dénichée en vacances, tout a de la valeur. « Vous avez un peu d’argent mais pas de fortune » résume, pour cette fois-ci, Quentin Breda.

 

Jean Bernard

 

 

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