Triste anniversaire ?
Il y a soixante ans, le ministère de la culture a été créé pour faire survivre la culture cultivée et la culture populaire dans un environnement économique qui ne lui était pas favorable. Soixante ans plus tard, le Ministère de la culture est sous le feu de critiques virulentes qui lui reprochent son tournant libéral. Syndicat du spectacle, artistes, chercheurs dénoncent la mise à mort d’un ministère public de la culture au profit des industries culturelles et du mécénat privé.
60 ans, l’âge de mourir ?
A la décentralisation culturelle s’est ajoutée la baisse continue des dotations publiques ; et ce n’est pas fini, comme en témoigne la lettre des professionnels du spectacle à Franck Riester, le ministre de la culture, intitulée : 60 ans, l’âge de mourir ? Aujourd’hui, les institutions et les politiques culturelles sont gérées sans moyens supplémentaires par des collectivités territoriales obligées de se tourner vers des financements privés.
Il y a dix ans, l’ancien ministre de la culture Jean-Jacques Aillagon avait déjà posé la question de l’existence de son ministère. Question posée avec encore plus de force aujourd’hui par les syndicats du secteur, des artistes, des militants et des chercheurs qui fustigent un ministère privé de moyens publics, des institutions culturelles vendues aux entreprises et aux fortunes privées et des « expériences culturelles » devenues « produits culturels ».
Aux antipodes de Malraux
André Malraux fustigeait les industries culturelles qu’il appelait les « usines à rêves ». « Parce que les usines à rêves ne sont pas là pour grandir les hommes, elles sont là très simplement pour gagner de l’argent ». Contrairement à l’industrie culturelle, incarnée aujourd’hui par la plupart des contenus diffusés sur internet, l’art et la culture ne se cantonnent pas aux plaisirs immédiats du sexe, de l’argent et de la mort. Le propre de l’art est de faire appel au symbolique qui seul peut nous sortir de notre condition.
Pour Claude Patriat, politologue, professeur émérite de l’Université de Bourgogne «Le ministère de la culture ne devait pas s’occuper de culture de masse (qui est la culture de la satisfaction immédiate et de la consommation) mais de la culture cultivée c’est-à-dire celle qui fait appel au symbolique et qui est l’instrument du collectif »..
Alors que la France se noie dans des débats nauséabonds distillés à tout va, syndicat du spectacle, artistes, chercheurs dénoncent la mise à mort d’un ministère public qui aujourd’hui n’est plus le garant de l’art et de la culture.
Loin des jugements et des prises de positions sommaires actuelles, face à un ministère vendu aux industries culturelles et au mécénat, il serait bénéfique pour tous de ne pas passer « à coté » des conséquences de cet appauvrissement culturel.
Ce qui doucement s’installe incarné déjà par les réseaux sociaux pourrait rapidement se transformer en immense misère culturelle.
Paroles D’Andouille