Montceau – L’incroyable force mentale de Maxime Manzoli, vivre avec un autre corps

Les traits de son visage ne laissent rien paraître. Il se fond dans la foule de la même manière qu’un coureur cycliste, qu’il est, au milieu du peloton. Certes, il a perdu une vingtaine de kilos, mais l’homme de 39 ans _ dans quatre mois _ est bien vivant et le revendique, parfois avec des trémolos dans la voix, lorsqu’il parle de l’épreuve qu’il a traversée et qu’il traverse toujours.

Maxime Manzoli est un miraculé qui force l’admiration. « Je ne peux pas travailler, je ne peux pas courir, quand je marche, mon équilibre est instable, je suis handicapé à 84%, mais je peux faire du vélo », formule-t-il. Il entend encore, après son accident, sur son lit d’hôpital à Dijon, les médecins dire : « Il est mort ». Aujourd’hui, dans le milieu médical, personne n’ose donner une explication à sa renaissance. Comment cet homme très grièvement blessé, à qui il ne reste que 0,5 millimètre de moelle épinière et à qui on a enlevé deux tiges en titane dans le dos il y a six mois, arrive-t-il à participer à des courses cyclistes et même à les gagner ? Ils répondent : joker !

Ce 23 décembre 2021, Maxime Manzoli, du côté de Saint-Léger-sur-Dheune, pédale sur son vélo. Il est en plein effort et aperçoit un peu plus loin le groupe de cyclistes qu’il tente de rejoindre. Une camionnette le dépasse, il baisse la tête, appuie fort sur les pédales. « Quand je lève la tête, je vois une masse blanche », se souvient-il. La camionnette est arrêtée sur le bord de la route. Il tente de l’éviter, mais il se prend l’arrête gauche du véhicule en pleine tête. C’est le drame.

Le monde s’écroule en même temps qu’il tombe à terre. Lui, à l’époque, patron de JM Cycles à Montceau-les-Mines, ne le sait pas encore, mais il est victime de tétraparésie, une paralysie consistant en une diminution des possibilités de contraction des muscles des quatre membres, due à des perturbations neurologiques au niveau de la moelle épinière, au niveau cervical. « Je me suis dit, rien n’est écrit, je me suis battu. »

Six mois après son accident,

il monte le Ventoux

Il lui était inconcevable de finir dans un lit ou dans un fauteuil roulant. Maxime Manzoli allait défier les lois de la médecine. De bouger un orteil, puis une jambe, un doigt, une main, allait renforcer sa conviction : « Je peux le faire » et il allait le faire. Une fois de retour chez lui, dans son cocon familial, auprès de sa compagne Mélanie, de ses deux enfants, de son kiné qui vient à la maison, des copains ou encore des commerçants montcelliens qui ne l’abandonnent pas, il souffre le martyr, il lutte, se bat pour permettre à son corps de se réveiller.

À partir du cou, il ne ressent plus ni le froid, ni le chaud, ni la douleur. « Mais je me suis relevé. Six mois après mon accident, en juillet 2022, j’ai monté le Ventoux à VTT en 4h30. Heureusement, je n’étais pas seul. » Grâce à Jean-Michel Ducoté, le président du Vélo Club Montceau, qui a créé une section handisport pour lui, Maxime Manzoli se remet en selle. « C’était dur à accepter, mais je n’avais pas le choix. » Il crée à son tour son association, Maxou para-cyclisme.

Sa vie a changé. « Je suis devenu patient, j’ai un équilibre pourri, mais je fais avec. » Sur son vélo, il enchaîne les cyclosportives. Sur quatorze, il en remporte douze. Il est même repéré par le club handisport de Seynod, en Haute-Savoie, une structure qui l’accueille en janvier dernier. C’est le grand saut pour le Montcellien, qui vient de disputer deux manches de la coupe de France : l’une à Longchamp, sur un circuit autour de l’hippodrome (70 km), puis le lendemain, il enchaîne 80 km à Adainville, dans les Yvelines. Il se bat comme un beau diable et, à sa grande surprise, termine à la deuxième place sur les deux épreuves en catégorie C2. « C’est mon coéquipier, Laïs, 17 ans, qui est hémiplégique, qui s’impose sur les deux courses. Quel superbe week-end ! » Son regard parle pour lui, il est heureux.

Avant son accident, Maxime Manzoli déboulait les pistes à VTT. Désormais, « je mène la même vie avec un autre corps ». Il est passé de 20 000 km par an à 4 000 depuis janvier, de 2 000 watts à 700, et s’apprête à participer, en principe, aux quatorze manches de la coupe de France, dont la prochaine, le 18 mai à Saint-Étienne.

S’il fallait illustrer le mot résilience, Maxime Manzoli en est le parfait représentant.

J.B.

 

 

Photos Patrick Van Heghe.

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