Il n’est, certes, pas l’auteur de l’évangile selon Luc. Il pourrait cependant, ce qui constituerait une bible, rédiger l’industrie selon Luc Devaux.
Luc Devaux et l’industrie au Creusot, sont deux noms qui vont très bien ensemble ou plutôt allaient. Un nom intimement lié à NFM Technologie, ladite société devenue aujourd’hui Mulhaüser France, le dernier fabricant de tunnelier français dont la disparition est annoncée, malheureusement.
Comme quoi, en cette soirée de remise des insignes de chevalier de la Légion d’Honneur à cet homme défenseur de l’industrie mécanique française, l’actualité est parfois vache. En effet, Luc Devaux, a dirigé NFM de 2001 à 2011, « j’ai quitté la société parce que j’étais en désaccord avec la stratégie du groupe chinois » précise-t-il. Il avait vu juste. « Malheureusement et conformément à tes pressentiments et ton diagnostique lors de ton départ en 2011, les erreurs de stratégie, les décisions de la direction du groupe se sont avérés catastrophiques et à ton retour, tu n’as pu qu’accompagner le démantèlement de l’entreprise pour sauver un maximum d’emplois » éclaire Jean-Paul Meunier, autre figure emblématique de l’industrie qui, encore peu, traçait la route de Metalliance.
Malgré les grandes difficultés de Mulhaüser, « elles ne doivent pas ternir cette réception » indique David Marti, maire du Creusot et président de la communauté urbaine Creusot Montceau. « Je dois saluer le travail que vous avez fait ici, vous avez toujours été un interlocuteur de qualité ».
« Vous aimez l’industrie » reprend le député Rémy Rebeyrotte, « et vous avez tout fait, à votre retour à NFM, pour que cela se passe au mieux ».
Le parcours professionnel de cet homme d’industrie a pris naissance en Loire-Atlantique où le petit Luc de Nantes prendra pour devise Favet neptunus eunti ou Neptune protège ceux qui voyagent. Ce fut le Tchad (service militaire) puis Saunier Duval à Nantes, ou encore Hepworth en Angleterre avant de « creuser son trou » à NFM. « Que de voyages en Chine pour assurer la pérennité et le bon fonctionnement de l’entreprise creusotine », expose Jean-Paul Meunier.
Quarante-quatre ans de carrière et quatre principes à respecter
Luc Devaux fait apprécier toutes ses qualités de négociateur, de décideur. Il est reconnu partout et par le plus grand monde. « Car des tunneliers, tu en as visités bon nombre tout autour de la planète, Guangzou, Shenyang, Guadarrama, Tabriz, Shiraz » égrène Jean-Paul Meunier.
Ses qualités et son expérience le conduisent également auprès de la société Aker Wirth en Allemagne et son activité de tunnelier. Luc Devaux développe le business à l’international, ce fut une belle réussite. Alors pas étonnant que NFM, en 2017, le sollicite à nouveau.
« Ton amour de la belle mécanique, des systèmes complexes, des beaux projets d’infrastructure, t’a conduit avec acharnement, ardeur, obstination, opiniâtreté à toujours promouvoir, défendre l’industrie mécanique française » énonce Jean-Paul Meunier.
Après quarante-quatre ans de carrière, le titre de chevalier dans l’ordre de la Légion d’Honneur couronne un investissement exemplaire, « dont je suis fier » formule Luc Devaux et « heureux que cette cérémonie ait pu s’organiser au Creusot, fief de l’industrie française ».
Une réussite qu’il doit à quatre principes « que je me suis obligé à respecter », dit-il. Le respect de l’actionnaire qui a toujours raison; le partage équitable des richesses entre l’actionnaire, les investissements et les collaborateur; les intérêts de l’entreprise et les ressources humaines où chacun apporte sa contribution. Il pourrait écrire une bible.
Ce fut souvent au détriment de son entourage, son épouse et ses enfants. Le temps arrive pour lui de respecter ses engagements qui ont fait de lui ce capitaine d’industrie. « Car Luc est également un mari aimant, un père et grand-père attentionné et affectueux », témoigne Jean-Paul Meunier avant de lui remettre la Légion d’Honneur.
Jean Bernard