Elle a le regard aussi affûté qu’une lame de couteau. C’est son arme favorite. Sandrine Gay taille dans le vif du sujet. Sa main ne tremble pas, son couteau immacule la toile sans laisser la moindre tache. Le travail est propre. L’huile n’a pas le temps de sécher qu’une deuxième lame vient creuser un nouveau sillon d’où va émerger une forme, une couleur. Son couteau transperce, souligne le trait, fait ressortir un détail, en gomme d’autres.
Au final, c’est l’accord parfait. Le couteau a fait son oeuvre, l’oeil du peintre a aiguisé son appétit. Enfin Sandrine Gay achève son allégorie. « Très longtemps j’ai peint au pinceau mais c’était mou du genou » dit-elle. Il lui fallait durcir sa palette, donner une autre dimension à sa peinture, la rendre plus difficile mais davantage en accord avec son tempérament. « Le couteau est plus complexe » précise-t-elle mais il traduit son expression de femme insoumise, celui d’une artiste libérée. « Je fais ce que je veux, je décide de ce que je veux ».
D’où l’intérêt de voir son exposition ce week-end. Il faudra prendre son temps pour contempler sa production d’une année, se donner le recul nécessaire afin d’admirer ses 101 toiles qui, les 2, 3 et 4 octobre seront exposées à la galerie d’art du château de la Verrerie au Creusot. « Je ne sais pas si toutes vont tenir » admet-elle.
Sandrine Gay expose et c’est un événement. Sa dernière exposition remonte à avril 2019 à Givry. La voilà de retour dans son berceau, sur sa terre qui l’inspire.
L’inspiration, elle l’a trouvée très jeune. A 16 ans, elle expose à Montchanin où elle est retournée, où elle assure ses cours de dessin et de peinture. Enseigner la passionne, peindre la fait respirer. « Trente-deux ans que je peins » et à chaque battement de coeur, elle a peur, qu’un jour, tout s’arrête. Que le goût de la peinture s’estompe, « j’ai peur d’arriver au bout, c’est une angoisse » confesse-t-elle.
Sandrine Gay est une boulimique de travail. Elle a besoin de peindre, « je peins tout le temps », des scènes de la vie, des portraits, le fruit de ses observations. « C’est 50% du travail avant de passer à la réalisation ».
Elle aime Edward Hopper, Modigliani aussi et bien d’autres. Elle aime l’art, « voir et ressentir ».
Même silencieuse, son regard parle. Sandrine observe toujours plus loin que l’horizon. Elle se lasse vite des choses trop proches et « c’est souvent comme ça pour tout ». Elle cherche en permanence, trouve sans trouver, plonge dans les rêves, se perd dans la mélancolie. « On peint toujours mieux quand on est moins bien » avoue-t-elle en esquissant un sourire.
Jean Bernard
Sandrine Gay, expose les 2, 3 et 4 octobre à la galerie d’art du château de la Verrerie au Creusot de 10h à 12h et de 15hà 19h. Entrée gratuite.