Agriculture – La chronique de Charles Landre, la rémunération en question

Communiqué de Charles Landre, conseiller municipal et communautaire de l’opposition du Creusot.

Rémunération juste des éleveurs :

agissons enfin !

 

L’agriculture est un des cœur battants de la France. Elle la nourrit, elle en structure les paysages depuis des siècles et en constitue un des patrimoines essentiels.

 

Les agriculteurs forment pourtant la seule corporation rétribuée en dessous de son coût de production. C’est indigne d’un pays de la France. Indigne dans ce que cela montre de l’impuissance politique.

 

Il est temps d’agir. Si nous ne le faisons pas, les départs en retraite non remplacés, l’impossibilité de transmettre les exploitations, les situations de détresse et de faillite et parfois les suicides, se multiplieront. Ils constituent déjà le signe que notre société est malade de ne pas savoir vraiment respecter et protéger ceux qui nous nourrissent.

 

L’État aurait dû imposer depuis longtemps des prix d’achats minimum au producteur correspondant sur le base des prix de revient que nous connaissons. C’est ce que prévoyait la loi « la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous » dite EGALIM. Elle n’est malheureusement respectée par personne, ni les industriels, ni les distributeurs. C’est à dire que pour 2 ou 3 centimes le litre en moins lorsqu’on parle de lait, quelques dizaines de centimes le kilo pour la viande, les agriculteurs français vendent à perte. Il existe bien des conventions tripartites, mais qui sont le fait d’acteurs privés et se développent à la marge. L’État, doit désormais imposer ces prix minimums.

 

Les collectivités locales ont évidemment aussi, par la structuration et la valorisation des filières, un rôle à jouer. Mais il faut engager des gestes forts et perceptibles, par exemple en reprenant totalement la main sur l’approvisionnement de nos cantines et en payant le vrai prix aux éleveurs.

 

Mais derrière les discours concernés, pour certains élus, le soutien aux éleveurs ne vaut pas  quelques centimes d’argent public supplémentaire et pourtant nécessaire !

 

Dernier exemple malheureux, une convention proposée par la CUCM, 6 communes et le Grand Autunois Morvan qui vise à améliorer les circuits courts, soutenir l’abattoir d’Autun et, bien que non contraignante pour les entreprises disposant du marché des cantines scolaires, à valoriser la viande à hauteur de 40 centimes le prix d’achat au producteur.

 

Le principe de la démarche est sain. Mais dans un contexte où le cours de la vache allaitante oscille autour de 4 euros le kilo (de 3,80 à 4,10 ces derniers mois) la valorisation de 40 centimes par le biais d’une subvention ne portera le prix d’achat au mieux qu’à 4,50 euros !

 

Or le prix de revient défini par les critères EGALIM est de 4,64 euros le kilo. La filière et l’État considèrent qu’en deçà de ce prix, il y a vente à perte. En s’engageant à valoriser symboliquement un petit volume de viande à hauteur de 40 centimes le kilo, nous sommes loin du compte.

 

Les collectivités locales doivent à minima respecter la loi. J’ai donc proposé que ladite convention soit modifiée afin que le prix d’achat à l’éleveur atteigne systématiquement le niveau du prix EGALIM. Cette proposition a été rejetée par la voix d’Evelyne Couillerot, vice-présidente de la CUCM, ainsi : « On demande des dépenses supplémentaires. C’est hallucinant ! »…

 

On parle de seulement 10 000 euros sur 100 millions d’euros de budget annuel pour la CUCM, mais il serait « hallucinant » de demander à ce qu’on respecte au moins les prix fixés par la loi en engageant quelques centimes de plus au kilo. Mais quelle honte et quel mépris.

 

Les discours « engagés » de responsables politiques sur le nécessaire soutien à l’agriculture seront hypocrites si les actes, même minimes, même de portée symbolique, ne sont pas en accord avec leurs prises de position.

 

En Saône-et-Loire où l’agriculture a une place si importante, il est inadmissible que nous ne nous acceptions de ne même pas respecter les minimums fixés par la loi ! Pas un produit ne devrait être acheté dans les cantines de Saône-et-Loire en dessous des prix de revient.

 

Nous avons les moyens de transformer profondément les mécanismes de rémunération agricoles. C’est à l’État de s’en emparer, c’est aux parlementaires d’être enfin efficaces. Hormis la ratification aveugle au traité de libre échange CETA, on attend par exemple toujours les prises de position concrètes de Rémy Rebeyrotte, député LREM de la 3ème circonscription de Saône-et-Loire. Il faut s’engager enfin pour des retraites dignes, pour un prix juste, pour une politique étrangère agricole et des mesures qui protègent nos productions. Les collectivités locales, elles, doivent montrer l’exemple par des achats publics ou parapublics qui rémunèrent correctement l’agriculteur.

 

Ne pas parvenir à s’y engager en 2021 est la marque d’une impuissance coupable. Jeudi dernier les éleveurs réunis à Clermont Ferrand ont manifesté dans l’indifférence quasi générale et subirent des tirs de grenade lacrymogène. Nous devons tous nous mobiliser à leurs côtés et cesser, collectivement, de regarder ailleurs.

 

Parce que l’avenir de l’agriculture française c’est l’avenir de la France, et qu’il passe, avant tout, par une rémunération juste.

 

Charles Landre

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