Travaux RCEA – Un gros coup de frein sur le commerce blanzynois

 

Les 3 km de travaux pour passer en 2×2 voies la RCEA dans la traversée de Blanzy vont coûter 65.7 M € et s’achever à l’horizon de l’été 2025, c’est-à-dire, 30 mois. Depuis début janvier, nous y sommes, les engins de chantier rugissent  mais ces travaux tant attendus depuis des années commencent à porter un lourd préjudice aux commerçants blanzynois.

Dans la théorie, même si tout a été prévu afin d’assurer une continuité de circulation avec la coupure rue de Chassagne et rue de l’Egalité pour déconstruire les ponts existants et la reconstruction de nouveaux ouvrages et la coupure de la rue Félix Clerc, en pratique, les automobilistes ont perdu leurs habitudes et ne s’y retrouvent pas. En gros, ils zappent les boutiques. « Aux heures de pointe, le matin et en fin d’après-midi, avec les déviations, il y a trop de circulation et stationner devient impossible » font remonter les commerçants de la rue de la République. « Le reste du temps, il n’y a personne » disent ils en choeur.

Les premiers dommages collatéraux se font donc sentir chez les commerçants principalement installés rue Jean Monnet, rue de la République et de la Gare, avec au bout, le bar-tabac le Val en Thym. « Ce qui me fait peur, c’est que les gens prennent d’autres habitudes et ne reviennent pas » rumine le patron, Jean-Pierre Volot. Pendant 18 mois, impossible d’emprunter la rue de l’Egalité qui est enjambée par le pont de la RCEA. « Moi, je note beaucoup moins de passage, les employés de Michelin ne passent plus. Tenez, dimanche, il me manquait 150 passages en caisse ».

 

« Ce n’est une baisse mais une chute »

(Jérôme du tabac-presse rue Jean Monneret)

 

Son confrère situé de l’autre côté, rue Jean Monnet, le tabac-presse Desbrières, est très inquiet. Vingt ans qu’il est là, « alors je ne vais pas me pourrir la vie pour la RCEA » grogne Jérôme. « Les chiffres sont très mauvais, ce n’est pas une baisse, c’est une chute depuis la fermeture de la rue de l’Egalité et celle de la rue Félix Clerc. Selon les jours, c’est  moins 20 à moins 40% sur le chiffre d’affaires ».

De chaque côté du pont, le client de passage ne passe plus ou très peu. « Faire 2 km supplémentaires ou perdre 5 minutes, les gens ne veulent pas se prendre la tête, ils vont ailleurs alors que la rue Jean Monnet est accessible » rappelle le buraliste. « A partir de 18h, je ne vois plus personne alors que je suis ouvert jusqu’à 19h30 ».

Du côté de la mairie, on ne reste pas inactif. Le maire entend les commerçants. « Hervé Mazurek est présent, nous échangeons beaucoup, il ne nous laisse pas tomber » reconnaît Jérôme. « Mais je ne m’attendais pas à ça, à cette chute brutale. » Une réunion avec les commerçants et la Dreal  (direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement) est prévue lundi 20 février prochain. Une autre suivra avec le député Louis Margueritte. « J’encourage les commerçants à créer une association ainsi ils pèseront davantage devant les décideurs », indique le maire.

 

Et demander quoi ? Chez le troisième buraliste de Blanzy, rue de la République, Isabelle Perrin, garde le moral mais ne voit pas l’avenir en rose. Elle a eu l’exemple de la coupure du pont de la République à deux reprises en novembre et décembre derniers pour les travaux préparatoires. « C’est bien simple, j’ai perdu 1000 € de chiffre d’affaires par jour. En novembre, c’est moins 20 000 € ». Déjà que cela ne va pas très fort avec les travaux du moment, elle n’ose même pas penser aux 18 mois qui vont couper Blanzy en deux.  « Sans aide, je ne demande comment échapper à la cessation d’activité. Il serait bien d’avoir au moins une indemnité pour les charges ».

 

Une seconde boulangerie-pâtisserie

quartier Beauregard

 

En face de chez elle, à la boulangerie-pâtisserie chez Rizet, voilà deux ans qu’Eddy, le patron et madame, réfléchissent à comment faire face à ces travaux. Eux aussi, quand le pont a été fermé fin 2022, ils ont connu une baisse de 40% du CA. Ce n’est donc pas tenable. Aussi, d’ici quelques mois, en août logiquement, ils vont ouvrir une seconde boutique du côté de Beauregard, route de Mâcon. « Là-bas, nos fabriquerons le pain mais les pâtisseries viendront d’ici (rue de la République) ».

Voici une manière intelligente de continuer l’activité et d’en créer une supplémentaire. « Nous avons neuf salariés, je ne me vois pas les licencier » déclare Eddy.

Plus bas, de retour rue Jean Monnet, Anthony Audry, le nouveau boucher-charcutier, non seulement il fait face à la problématique des travaux mais aussi à la hausse des matières premières. « C’est plus 30% sur les volailles,  + 1.20 € sur le kilo de boeuf à la carcasse, + 1 € sur le cochon » précise-t-il. Résultat, le CDD de son employé n’a pas été renouvelé et celui en CDI a été licencié. « Nous ne pouvons pas répercuter toutes les hausses sur les prix au magasin » dit-il.

Rue de la République, même à la station essence et garage Peugeot, « c’est compliqué pour nos clients de venir » affirme Loïc, le gérant. Il vend moins d’essence depuis la fermeture de la bretelle d’accès à la RCEA vers la Poste. Il n’ose même pas imaginer quand le pont de la République sera coupé.

 

Les commerçants de Blanzy ne jouent pas une dramaturgie même si leurs témoignages sont saisissants mais la réalité est là, les travaux de la RCEA impactent leur quotidien et ça ne fait que commencer.

 

Jean Bernard