C’est en toute catimini que le sous-préfet d’Autun a souhaité rencontrer des gilets jaunes du Magny ce jeudi enfin de journée dans un bureau de l’hôtel de ville mis à disposition par Marie-Claude Jarrot. Quelle ne fut pas sa surprise de voir débarquer d’autres gilets jaunes désireux de rencontrer Eric Boucourt. « Mais il est déjà avec des gilets jaunes, vous ne le saviez pas ? » interroge madame le maire sur le perron de la mairie.
Pour qu’un sous-préfet, à la demande du préfet, vienne s’enquérir de l’organisation de la mobilisation au Magny témoigne d’une certaine inquiétude au plus haut niveau de l’Etat à deux jours de l’acte IV du mouvement populaire.
Car ce week-end, plus exactement ce samedi 8 décembre 2018 est celui de tous les dangers. Depuis mercredi, puis jeudi, le gouvernement multiplie les appels au calme, il tente par tous les moyens de désamorcer cette fureur populaire, cette vague jaune de mécontentement. Et quand bien même Paris est la ville la plus ciblée à tout point de vue, en province, les services de l’Etat sont sur le qui-vive.
Alors que le sous-préfet s’apprête à quitter l’hôtel de ville
après une heure de discussion, au bas de l’escalier
il est stoppé net par un mur de gilets jaunes.
Ils voulaient voir descendre le sous-préfet,
ils ont vu s’arrêter Eric Boucourt.
« Qu’êtes-vous venu faire ? » lui demande-t-on.
« J’ai souhaité rencontrer quelques-uns d’entre vous (ils sont six), des volontaires qui ne sont ni vos porte-paroles, ni vos représentants m’ont-ils dit, c’était une rencontre informelle ».
En somme, le préfet ne veut pas de problème ce samedi ni les autres jours à l’échangeur du Magny ou en d’autres lieux. Le sous-préfet vient s’en assurer et aurait aimé aussi connaître, par la même occasion, les principales doléances des gilets jaunes du Magny. Mais sans porte-parole, il est reparti bredouille enfin pas tout à fait puisque dans le hall, des gilets jaunes laissent parler leur coeur.
« Les gens en ont ras-le-bol ».
« Il est impossible de vivre avec le Smic ».
« Il faut un changement de notre système politique total. Changer ce gouvernement de m… ».
« Les gens n’ont plus confiance en ceux qui nous gouvernent. Font-ils preuve de cynisme ou ne connaissent-ils rien à rien ? »
« Pourquoi avoir envoyé seize fourgons de CRS au Magny le 24 novembre ? »
« A la télé, on nous traite de tueurs ! »
Eric Boucourt écoute, calme. Répond. « Ici, je n’ai pas vu de tueurs ni de casseurs, c’est un coin pacifique ». Quant aux CRS, « difficile d’évaluer le nombre de manifestants quand vous ne faites pas de déclaration. S’il ne se passe rien, ils repartent. Il faut trois jours pour avoir les CRS ». Quelques minutes pour le PSIG (peloton de surveillance et d’intervention de la gendarmerie) un dimanche soir devant la plateforme Lidl à Coriolis.
Les gilets jaunes du Magny sont prévenus. Samedi, filtrage oui, blocage non. C’est exactement le mot d’ordre depuis le 17 novembre.
Jean Bernard