Montceau – En 1965, ils sauvent 9 personnes, André Buttigieg et Robert Gindre sont des héros

« C’est exceptionnel ce que vous avez fait » s’exclame Marie-Claude Jarrot, mardi soir dans le salon d’honneur de l’hôtel de ville de Montceau-les-Mines.

« On s’est baignés » lui répond 60 ans après, quelque peu magnanime, André Buttigieg.

A l’époque, en septembre 1965, au quartier de la Sablière, là où coule la Bourbince, deux jeunes hommes de 18 ans réalisent des actes héroïques. Mais en ce temps-là, de chaines d’info pour capter les images et inonder les petits écrans des visages de Robert Gindre et André Buttigieg, n’existaient pas. Et pourtant, sans se poser de questions, ils ont plongé dans les eaux de Bourbince en cru pour sauver des vies.

Même encore aujourd’hui, Robert Gindre, n’avait jamais rien dit à sa famille. Sauver des personnes, il l’a fait.

On pourrait presque parler de légende, « mais ce que nous allons célébrer ce soir, n’en n’est pas une. C’est bien vrai et ça s’est passé ici, à Montceau il y a 60 ans » annonce madame le maire. Mais sans le travail patient et passionné de Sylvie Badon à travers l’exposition et le film sur la vie dans nos quartiers de 1945 à 1990 dont il sera diffusé un extrait justement sur l’inondation de 1965 et le témoignage d’André Buttigieg, des visages sont apparus, des souvenirs et des histoires enfouies ont ressurgi.

Au détour d’un témoignage, on apprend que deux jeunes habitants de la Sablière, « deux copains ont décidé qu’ils ne laisseraient pas leurs voisins mourir », raconte le maire.

A leur âge, on pense plutôt aux mobylettes, au foot dans la rue, « au rugby » intervient Robert Gindre, aux baignades à Montaubry, aux bals du Syndicat des mineurs, « mais pas forcément à devenir des héros » narre Marie-Claude Jarrot.

Il y a 60 ans, André et Robert ont écrit une des plus jolies pages de l’histoire de Montceau. A bord d’une barque, celle de monsieur Pigeat, avec Serge, ils sont partis sauver une famille bloquée sur un toit. « Nous avons réussi à les ramener sur la berge avant une mort certaine. Un quart d’heure après, le toit s’effondrait » se souvient parfaitement André. Ce n’était pas une scène de cinéma.

 

 

Pour ne pas se noyer,

il lui assène deux coups de poing

 

 

« L’eau montait de 40 à 50 centimètres à l’heure et le débit était de 250 m3 par seconde soit 250 000 litres par seconde » précise à son tour Robert.

Ensuite, André et Robert ont plongé dans l’eau glacée, au milieu des planches et des clapiers qui flottaient. Ils ont cassé un vitrail pour sortir madame Marcolongo et son fils au moment où l’eau arrivait à 10 centimètres du plafond. Cinq minutes après, il eut été trop tard. Et quand le fils, Lino, pris de panique a failli noyer André, son copain Robert lui a asséné deux coups de poing pour l’assommer et le sortir de la maison.

C’est avec un matelas pneumatique qu’ils sont ensuite retournés chercher madame Marcolongo, puis monsieur Mourrier, frigorifié, l’eau jusqu’au cou, assis sur sa table comme s’il attendait la fin. « Mais grâce à vous, ce ne fut pas la fin » sourit madame le maire. « A vous deux, avec vos camarades, vous avez sauvé neuf vies ». Neuf vies dans une nuit noire où l’eau a tout emporté.

Sans mesurer l’importance de leurs actes de courage, André et Robert sont rentrés chez Torrino, ils ont enfilé des vêtements secs et avalé un café chaud et « vous n’avez rien dit » s’étonne encore Marie-Claude Jarrot. « Vous avez repris vos vies comme si de rien n’était ». André et Robert n’étaient pas des frimeurs.

André Buttigieg est devenu chef mineur avant de faire carrière dans les travaux publics. Robert Gindre a été expert en robotique, il a enseigné, voyagé et s’est construit une belle carrière.

« Mais de cette nuit-là, silence. Comme si sauver neuf personnes, c’est normal » souligne encore troublée, madame le maire.

C’était héroïque et beaucoup trop grand pour rester dans l’ombre.

« Aujourd’hui, Montceau-les-Mines veut que votre histoire soit connue, que vos noms soient gravés dans la mémoire de la ville » insiste-t-elle avant de leur remettre à chacun, « avec une immense fierté », la médaille de la ville de Montceau-les-Mines. Et quand bien même André n’a jamais aimé danser aux bals du Syndicat, « vous avez menez ce soir-là, un ballet héroïque avec les flots de la Bourbince ». Quant à Robert, lui qui a collectionné les médailles de natation au Plessis, celle qu’il a reçue, « est sans doute la plus belle de toutes ».

Ils ont devenus deux héros discrets, deux héros de Montceau à tout jamais et aujourd’hui, tout le monde le sait.

 

 

J.B.

 

 

 

 

Robert Gindre, Sylvie Badon à l’origine de l’exposition de la vie dans les quartiers et enfant de la Sablière, et Christian Merlin, le copain qui a lancé le matelas pneumatique.

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