Quand Legory rencontre Michel Lacroix, une allégorie « chavannesque »

Une averse, un arrêt et une rencontre avec Michel Lacroix aux Chavannes à Saint-Vallier. Legory Bertrand se souviendra longtemps de cet intermède avant de reprendre la route qui doit le conduire jusqu’à la Mer Noire.

Il ne remportera jamais le Tour de France. Legory Bertrand (Legory est son prénom) a d’autres prétentions aussi nobles que celle d’un forçat de la route. Il a décidé, sur son VTT et sa remorque, de s’offrir un somptueux voyage en Europe pendant un an juste à force de ses mollets.

Le hasard a voulu _ il n’y a jamais de hasard _ que Legory, originaire de Pont-de-Salars dans l’Aveyron qu’il a quitté mi-avril, suive le canal du Centre et tombe, du moins s’arrête au restaurant des Chavannes à Saint-Vallier. « Ce matin (jeudi 7 juin 2018), j’ai repris la route depuis le camping de Palinges (où il a passé la nuit) et je pensais me mettre à l’abri, boire un café, le temps que l’averse passe son chemin » raconte Legory.

La tête de veau du jeudi

Sauf qu’il ne savait pas où il avait mis les pieds. Au restaurant des Chavannes, on y rentre mais on ne sait jamais quand sonnera l’heure du départ. Quand Michel Lacroix, patron émérite vous prend sous son aile, quand ses bacchantes frémissent, inutile de résister, vous êtes son hôte. « C’est mon invité depuis ce matin. C’est un gamin qui me plaît ». Ainsi parlait Michel Lacroix de Legory Bertrand.

Et jeudi, aux Chavannes, c’est tête de veau. « Je me suis régalé » notifiait le cycliste aveyronnais qui, à 15h, digérait tranquillement la bonne pitance du jour. « J’ai le temps » disait-il en sirotant son café.

Le temps aussi de raconter son envie de voyager, de voir l’océan atlantique qu’il n’avait jamais vu du côté de Bordeaux avant de longer la côte, de s’engager le long de la Loire, de suivre l’euro vélo6 qui va le conduire de Bâle jusqu’à la Mer Noire, puis la Grèce, l’Italie et retour en France.

Il est libre Legory

Un an sur son VTT pas vraiment adapté pour ce genre de périple d’environ 10 000 km mais qu’importe d’avoir mal aux fesses les premiers temps, les soucis de remorque (il en a changé à trois reprises). Sur son vélo, Legory se sent libre, libre d’aller, libre de faire, de rencontrer des gens comme Michel (Lacroix), des randonneurs. « Je me sens plus heureux que chez moi. C’est le bonheur même si je dispose de tout ce dont j’ai besoin chez moi » analysait-il sereinement.

Aujourd’hui, l’Aveyronnais relativise, surtout après son accident de moto le 24 février 2017. Fracture du fémur droit en dix morceaux et jambe plus courte que l’autre. « Mon podologue m’a dit que le vélo serait une bonne source de rééducation et comme l’idée de m’installer éleveur de brebis laitières n’a pu se faire, l’idée de partir a germé, j’ai économisé et je me suis lancé ».

Son monde à l’envers

Un voyage initiatique pour un jeune homme qui veut démontrer « qu’on peut de détacher de tout pendant un an ». Au fil de ses kilomètres, le soir, dans sa tente, il note ses impressions sur un carnet de voyage. Il observe, échange comme avec ces plaisanciers l’autre jour au bord du canal avec qui il a partagé le repas. Il ne s’en lasse pas, il aime cette vie de bohème. « Je prend mon temps ».

Avec 2000 km au compteur à Saint-Vallier à pousser sur les pédales de son engin (70 kg avec les bagages et la remorque), il envisage déjà repartir pour un autre périple. « Mais à deux cette fois-ci ».

Sur l’intérieur de son avant bras gauche, il s’est fait tatouer la carte du monde à l’envers avec la rose des vents adossée à la Russie. Pourquoi? « Et pourquoi pas » a-t-il répondu. Question saugrenue à destination d’un jeune homme qui va là où le pousse le vent.

Alors bon vent l’ami aveyronnais.

Jean Bernard

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