Histoire – Manuel Maia Teixeira pense toujours au couple qu’il a sauvé de la noyade. Qu’est-il devenu ?

Il va avoir 69 ans et sa vie est jalonnée d’actes héroïques. Manuel Maia Teixeira, le dit lui-même, « je suis né pour sauver des vies ». Il se raconte dans un texte qui nous publions (ci-dessous). Sa plume est facile, ses souvenirs poignants. Il espère ainsi, une trentaine d’années après, retrouver ces deux jeunes qu’il a sauvés de la noyade après un accident de voiture à Montceau-les-Mines. « Je ne sais pas ce qu’ils sont devenus. Ils étaient de Montceau, la jeune fille habitait à Bellevue et son copain était à l’école militaire à Autun », rappelle-t-il.

Manuel Maia Teixeira habite aujourd’hui à Gourdon. « A l’époque, je devais avoir 37/38 ans » et cet accident, ce sauvetage dans le petit étang du Plessis, il y pense régulièrement. Alors il écrit, couche des mots, les partage avec son entourage. Cet ancien employé chez PPM à Saint-Vallier, « j’étais au bureau d’études » est un homme à part. Il ne recherche pas les honneurs mais il a juste besoin de partager des passages de sa vie.

J.B.




Sauver quelques vies est le plus beau cadeau de ma destinée.
Certains naissent pour gagner des médailles.
D’autres pour gagner de l’argent.
Moi, je suis né pour sauver des vies.
J’ai pu aussi apporter un soutien moral face à une difficulté marquante pour ceux qui font partie de mon parcours.
Je n’avais que 15 ans quand j’ai sauvé un garçon de la noyade qui avait 2 ans de plus que moi.
J’étais là au bon moment, mon regard où personne d’autre ne regardait.
Je vois encore une main sortir de l’eau et glisser doucement vers le fond.
La plage est bondée de monde.
Le surveillant est occupé par la piscine flottante alors que les gamins s’agitent.
Lui, tout seul à la limite de la zone de bain autorisée, en pleine difficulté est déjà dans la phase de coulée finale.
Je me lance à dans l’eau jusqu’à lui, plonge pour le choper par les cheveux et je le ramène au bord de l’eau.
Les pompiers sont appelés et finissent par le ramener à la vie.
Le maître nageur me félicite et plus tard je deviendrai un nageur de grand fond avec un brevet que mes enfants aiment encore me rappeler comme le plus beau diplôme à mon palmarès.
Ceci dans notre étang du Plessis à Montceau les Mines et en Saône et Loire.
Plus tard et déjà adulte, dans la rivière de Amarante, lieu ou je passe souvent mes vacances au Portugal, lieu aussi béni, je porte assistance à une jeune femme disparue sous l’eau.
Pour le coup un de mes frères est avec moi et cela facilite le sauvetage alors que sa sa mère crie de désespoir.
Pas de surveillance et nous nous débrouillons seuls.
Sur cette même rivière et une autre fois, je vois  un couple affolé et appeler au secours pour leur petit garçon coincé dans les rochers sur barrage. Il n’arrive plus à respirer car emporté par le courant très fort.
Je calme d’abord les parents et ensemble nous arrivons à  libérer l’enfant pour le sortir de cette situation compliquée.
Je passe sur les autres évènements qui sont sortis de mon esprit et plus anodins.
Je vous raconte le dernier événement et qui a hanté plusieurs fois mon sommeil. Il est aussi lié à cette destinée qui est la mienne et fort en émotions.
Cela se passe un dimanche après-midi et il fait très beau.
Mes enfants et nous parents, faisons une promenade autour du Plessis  comme cela se passe régulièrement à cette saison de l’année et proche de l’automne.
Un bruit terrible et un choc frontal entre deux voitures vient de se passer, cela juste à vingt mètres devant nous.
Cela se passe sur la voie qui sépare le petit étang du plus grand des étangs du Plessis.
Je tourne un peu ma tête et comme dans une scène au ralenti, je vois une des deux voitures voler et tomber dans la petite étang.
Je la vois encore se retourner avec les quatre roues en l’air et s’enfoncer progressivement dans l’eau.
Ma première réaction est de sauter de suite dans l’eau pour porter secours.
Mon épouse court alors à la cabine toute proche, près de l’ancienne plage du lac pour appeler les pompiers.
Notons que les téléphones portables sont  encore très limités pour le public à cette époque.
Dans ma première réaction et déjà dans l’eau, mon souci est de plonger et voir ce que je peux voir ou comprendre.
Les vitres de la voiture sont cassées, je réussis de suite à attraper une tête de la jeune fille.
Elle est sur le siège arrière, je suppose entrain de se noyer.
Je la sors de l’eau et la confie à d’autres personnes déjà présentes sur le bord de l’étang.
Ils la prennent en charge et cela me rassure.
Je retourne sous l’eau et je comprends que le conducteur est encore attaché par sa ceinture.
Je n’arrive pas à le détacher.
Je ne sais comment faire et c’est horrible.
Par chance je vois arriver un jeune homme qui vient de comprendre ce qui se passe.
Il a un couteau à la main.
Il plonge et coupe lui même la ceinture de sécurité.
Ensemble nous sortons le jeune homme inanimé de la voiture.
Nous le plaçons couché sur la rive.
Il rejette de suite de l’eau de ses poumons et reprend doucement ses esprits.
Nous n’avons pas à  lui faire de réanimation, il reprend conscience.
Sa préoccupation étant de savoir où est sa fiancée et passagère à l’avant.
Elle est là à côté, encore sous le choc, dans sa jolie robe blanche.
Elle est sortie de tout danger.
Je peux vous dire aussi que les pompiers arriveront et je me le rappelle encore:
bateau gonflable, combinaisons et équipements de plongée.
Le problème, ils ne sont arrivés que vingt minutes après l’alerte de mon épouse.
Ne me demandez pas pourquoi.
Le jeune couple accidenté est évacué vers l’hôpital.
La police prend mon identité et celle du jeune qui a coupé la ceinture.
Je rentre chez moi avec vêtements et chaussures mouillés.
A pied car notre domicile est le long de la rive du Plessis.
Mon épouse ne dit rien et mes enfants s’embrassent.
Ils me manifestent une certaine peur et mélangée à la fierté de leur  père.
Un papa devenu un héros et ceci en si peu de temps.
La nuit arrive et calme nos esprits.
Le temps passe et je ne suis même pas convoqué par la police pour témoigner.
Pas de communication dans la presse ou réseaux sociaux qui n’existent encore pas.
Je pense même que je raconte mon histoire à mes proches et à quelques amis par la suite pour me rassurer moi-même.
Un an passe et un soir nous recevons un appel à la maison.
Un jeune couple souhaite venir nous remercier pour notre intervention dans leur accident de voiture.
Nous acceptons et imaginez la joie d’avoir cette surprise.
Ils viennent nous rendre visite une fin d’après-midi, avec un magnifique bouquet pour mon épouse et une bouteille de whisky pour moi.
Nous échangeons un peu.
Ils me témoignent leur reconnaissance pour ma modeste participation dans leur survie.
Nous parlons de ce terrible accident.
Je suis terriblement troublé et dans un réflexe tout naturel, les invitons à dîner. Les mots et gestes nous permettront de mieux faire connaissance.
Ils acceptent et avec du temps ils nous racontent leur vécu, leur peur, leur doute pendant des minutes qui pour eux ont paru une éternité pendant notre intervention.
Pour la jeune fille, la récupération est rapide côté physique.
Nous ne parlons pas des effets psychologiques.
Pour le garçon qui a avalé beaucoup d’eau polluée de boue, la récupération a été plus longue avec trois semaines de soins hospitaliers.
Nous discutons pendant des heures, de nos vies et de nos goûts.
Ce couple est beau.
L’amour les anime et cet accident les a rendu encore plus amoureux.
Je le perçois par leur gestes et regard plein de tendresse.
Leurs mots me touchent.
Mes enfants sont présents et attentifs à leur confidence..
Moi je suis heureux.
Ils prennent congé de nous et la vie nous a liés, c’est du moins ce que je pense à ce moment là.
Les années sont passées.
Je n’ai plus jamais eu de leurs nouvelles.
Ce n’est pas grave et  je pense à eux souvent .
Je les imagine encore heureux et ensemble.
S’ils ont des enfants, je pense même que cette histoire fait partie des échanges familiaux.
Voilà, je suis aujourd’hui très heureux de vous le raconter et ceci explique pourquoi je peux ne pas être parfait.
Ces quelques bonnes actions participent à racheter les mauvaises actions à mon actif.
J’espère tout de même que la balance penche encore du bon côté.
Prenez soin de vous.

Manuel Maia Teixeira

4 commentaires :

  1. Belle histoire. Par contre je pense qu’on confond ici courage et héroïsme.
    Par les temps qui courent , Il convient donc de distinguer l’acte courageux de l’acte héroïque, …
    Les mots ont une importance .

  2. louis passeur,si par hasard ,une personne vous sauve la vie,je ne pense pas que vous allez distinguer acte courageux ou héroique
    mais lui dire un grand merci

    • Tout à fait Jojojo, je lui dirais un grand merci, je dirais que c’est une personne très courageuse, il deviendrais j’espère un ami, mais ne sera pas pour autant mon héros. Bon après je suis d’accord avec vous qu’on joue un peu sur les mots. L’important c’est qu’il ne se soit pas barré en regardant ailleurs et qu’il ait sauté à l’eau . Et c’est quelqu’un qui ne sait pas nager qui vous dit ça.

  3. Comment ce fait il que ce monsieur n’est jamais reçu une médaille d’honneur car il a mériterait.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *